
Selon Martin Winckler, la ménopause est programmée dans le génome humain depuis des millénaires. *
Il serait alors aisé de croire que le mot consacré à cette période existe depuis fort fort longtemps.
Pourtant, il n’en est rien.
Comment et à quelle époque ce terme fut-il créé ?
Qui en fut en l’inventeur ?
Quelles furent ses intentions ?
Aménovia vous dévoile aujourd’hui l’une des fabuleuses histoires secrètes qui entoure la ménopause.
Avant le XIX ème siècle !
Avant le XIXème siècle, la ménopause était mentionnée sous les termes « fin des menstrues, fin des règles, retour d’âge ou encore âge critique ».
L’âge critique étant une notion découlant de la théorie de la division pythagoricienne des âges de la vie selon laquelle notre évolution se calcule de 7 ans en 7 ans, 49 ans représentant alors l’âge critique pour les femmes.
Au siècle des lumières, tout s’éclaire !
Nombreux philosophes et médecins s’intéressèrent à la façon dont les femmes vivaient la fin de leurs règles.
Un premier livre fut rédigé par un médecin français sans pour autant entrer dans la postérité *, ce jusqu’au jour où Charles Louis Prosper de Gardanne, Docteur en médecine de la Faculté de Paris, Médecin de charité du 3ème arrondissement, Membre du Cercle Médical, de la société physico-médicale de moscow etc. se mit en tête de poser des mots sur les maux.
Charles Louis Prosper de Gardanne, l’inventeur de la Ménopause
Pour Charles Louis Prosper de Gardanne, donner matière aux praticiens, éclairer les femmes, trouver le nom qualifiant au plus juste cette étape charnière, représentait une juste cause.
Décidé, il s’attela à la rédaction d’une monographie d’un genre nouveau style « la fin des règles pour les nuls ».
Nous étions alors en 1812.
1816, année de la question existentielle
Quatre ans plus tard, Charles Louis Prosper était heureux et fier de lui.
Sa monographie était presque achevée soit 435 pages consacrées aussi bien à l’anatomie qu’à des conseils pratiques portant entre autres sur l’alimentation le sommeil, où la nymphomanie qu’il appelait élégamment la fureur utérine.
Il restait toutefois une question à élucider : Comment synthétiser en un mot un phénomène physiologique qui perturbe à ce point l’équilibre hormonal féminin ?

Comme tout médecin digne de ce nom, Charles avait appris le grec et le latin. C’est donc naturellement vers ces langues anciennes qu’il se tourna.
- « Hum, hum, hum … voyons voir ! se dit-il
Fin de règles = grec ménos (mois, menstrues) + latin pausie (arrêt) = Ménespausie.
Mais oui, mais c’est bien sûr ! Ménespausie ! Euréka ! Le mot magique est arrivé !
Et dire que ça fait quatre ans que je me prends la tête !
Fichtre ! Pourquoi personne n’y avait pensé avant moi ?
Molière aurait quand-même pu faire un effort lui qui était si prolixe, franchement je ne comprends pas !
Ménespausie … Hum !
C’est vrai, c’est bien trouvé mais seigneur que ce mot est laid à l’oreille !
Laissons le temps faire son œuvre. Je vais trouver, hum, je le sais, je le sens.
En attendant, ne privons pas les femmes et les médecins de mon savoir, publions mon traité, le mot juste viendra en temps et heure ».
1821 : De la ménopause ou l’âge critique des femmes, naissance d’un mot
Cinq ans plus tard, Charles Louis Prosper était au firmament.
Après avoir retourné le mot sous toutes les coutures, « ménopause » naquit un beau matin.
Plus ronde, plus harmonieuse que ménespausie, ménopause nous poussait droit vers la chambre du repos. La maman pouvait se ranger des voitures.
La gestation du traité avait été longue : neuf ans de recherches, cinq ans à imaginer le mot parfait.
Quant à l’accouchement, parlons-en !
Il se passa si bien qu’aujourd’hui encore, quel que soit l’endroit du monde d’où on la mentionne, « ménopause » demeure l’unique façon de nommer cette période charnière.
Grâce à sa seconde édition de son traité « De la ménopause ou l’âge critique des femmes », Charles Louis Prosper allait entrer dans la postérité.
1821- 2021
Deux siècles ont passé depuis les écrits de Charles Louis Prosper.
Deux siècles durant lesquels les femmes se sont battues (et se battent encore) pour obtenir l’égalité des sexes.
Qu’adviendra-t-il du mot ménopause ?
Chercherons-nous à le remplacer ou au contraire arriverons-nous à l’accepter ?
Par Sophie Kune @menopause.stories

Sources :
• Daniel Delanoé, Sexe, croyances et ménopause- Éditions Hachette Littérature
• Jean-Baptiste Jeannet des Longrois (Docteur en médecine. - Docteur-régent de la faculté de médecine de Paris. - Professeur de chirurgie ) : « Conseils aux femmes de quarante ans » publié en 1787. Source BNF
• Martin Winckler- C’est mon corps- Editions Iconoclaste.